Le secteur canadien de l’entretien automobile évolue, non sans difficultés. Actuellement, l’industrie est confrontée à des problèmes de main-d’œuvre qui pourraient menacer sa pérennité et sa croissance. Il y a une pénurie de techniciens d’entretien automobile qualifiés, un déclin des formations pour les métiers de l’automobile et, en même temps, une augmentation des immatriculations de véhicules électriques (VE). Qui plus est, le parc automobile du Canada est en bonne santé et en pleine croissance, ce qui ne fait qu’accroître la pression pour résoudre les problèmes de main-d’œuvre.
Quel est exactement le problème de la main-d’œuvre? Tout d’abord, le taux de rotation des techniciens est alarmant, avec une augmentation de 65 % signalée en 2023. De ce nombre, 46 % sont partis pour des emplois mieux rémunérés. Si la rémunération est un facteur, il n’est pas le seul. Cette rotation est aussi alimentée par une mauvaise perception du public, notamment celles d’un manque de perspectives de développement de carrière et de mauvaises conditions de travail.
Il existe toutefois des moyens de relever ces défis. Lors de l’édition 2024 du Congrès national de l’AIA Canada, le modérateur James Channer s’est joint aux experts de l’industrie Shannon Spano, Kevin Weaver, Sylvain Séguin et Alan McClelland pour discuter de ce que leurs organisations font et de ce qui peut être fait pour assurer le succès à long terme de l’industrie de l’entretien automobile.
Obstacles aux talents et à l’attractivité
Pour relever les défis de l’industrie en matière de main-d’œuvre, il faut d’abord en comprendre les raisons. L’un des aspects clés est l’attractivité de l’industrie.
« Le mot « attractivité » est problématique. Tout le monde essaie d’être une industrie attrayante », a déclaré Alan McClelland, doyen du Centennial College. « Il s’agit de trouver des personnes qui méritent qu’on investisse en elles et de trouver des personnes qui s’intègrent bien dans l’organisation. Ils ne correspondent peut-être pas exactement à ce que vous recherchez, mais ils ont le potentiel de développer les compétences dont vous avez besoin. »
Malgré les efforts déployés pour promouvoir la diversité, l’équité et l’inclusion (DEI), la disparité entre les sexes persiste, avec seulement 2,4 % des techniciens d’entretien automobile au Canada. Shannon Spano, vice-présidente des ventes chez Wakefield Canada, affirme que pour que plus de femmes rejoignent l’industrie, il est important d’être plus accueillant et inclusif et que plus de femmes sachent qu’il s’agit d’une industrie formidable dans laquelle elles peuvent s’impliquer.
« En tant que femmes, nous sommes programmées et étiquetées. Ce n’est pas que notre secteur n’est pas une option viable, mais la situation est due en grande partie à la manière dont les femmes sont guidées dans leur éducation. Il faudrait informer et sensibiliser les conseillers d’orientation aux options de carrière disponibles dans notre secteur d’activité », a déclaré madame Spano. « Nous avons besoin d’enseignants qui encouragent les femmes à ne pas avoir peur dans leur carrière », a-t-elle ajouté.
La compétitivité contribue également de manière significative à rendre l’industrie plus attrayante. Bien qu’il soit essentiel d’offrir des salaires et des avantages sociaux concurrentiels, les parcours et les possibilités de développement de carrière le sont tout autant.
« Notre travail, en tant qu’organisation, est de sensibiliser et d’informer les gens sur ces parcours », a déclaré Sylvain Séguin, président du Réseau Fix.
« Oui, la rémunération et les salaires concurrentiels sont essentiels, mais nous devons surtout inciter les gens à travailler dans l’industrie. Nous devons inspirer les jeunes à propos des carrières et des différents parcours de carrière dans l’industrie », a déclaré Kevin Weaver, président et directeur général du Georgian College. « Les jeunes d’aujourd’hui n’entendent pas parler de mobilité. Ils entendent plutôt parler de ce qu’ils doivent faire de leur vie, de trouver une carrière et de s’y tenir ».
Les organisations doivent sensibiliser les étudiants et leur montrer comment ils peuvent évoluer et se développer au sein de l’industrie. Les étudiants veulent des opportunités dans des secteurs qui font partie du bien commun; ils recherchent des entreprises qui leur apporteront croissance et prospérité au fil du temps. En intégrant le secteur de l’entretien automobile, ils contribuent à un service essentiel de la vie quotidienne des Canadiens et Canadiennes.
Les possibilités de formation et de perfectionnement vont de pair avec la sensibilisation. Les programmes de formation et les certifications doivent évoluer pour répondre aux besoins changeants de l’industrie, surtout si l’on considère la rapidité avec laquelle la technologie émerge autour des VE et des systèmes d’aide à la conduite (ADAS). Malgré cette émergence, le nombre de techniciens d’entretien automobile certifiés a stagné depuis la pandémie.
« À l’heure actuelle, le temps, c’est de l’argent, et personne ne dispose du même temps. Nous devons soutenir nos clients et créer plus d’espace pour que les techniciens puissent être des techniciens », a déclaré madame Spano.
Contourner les obstacles
Pour relever ces défis et assurer le succès à long terme de l’industrie, voici quelques recommandations :
1.Mieux promouvoir l’industrie : l’industrie doit être proactive et se présenter comme une option de carrière attrayante qui valorise la diversité, les environnements de travail positifs et les possibilités d’évolution de carrière.
2.Investir dans l’éducation et la formation : les programmes de formation doivent être mis à jour pour refléter la nature évolutive de l’industrie, en se concentrant à fournir aux étudiants et aux techniciens existants une expérience pratique et des certifications. De plus, cet investissement doit inclure des programmes de formation axés sur les VE et les autres avancées technologiques.
3.Mieux soutenir les parcours professionnels : les employeurs doivent développer des parcours de carrière clairs, des possibilités de croissance, ainsi que des rémunérations et des avantages sociaux concurrentiels afin d’attirer et de retenir les talents.
4. Collaboration et partenariat : les différents acteurs du secteur, les établissements d’enseignement, les associations et les organismes gouvernementaux doivent collaborer pour trouver des solutions globales qui s’attaquent aux causes profondes de la pénurie de talents et de la rotation des effectifs.
En suivant ces recommandations, le secteur de l’entretien automobile pourra vaincre les difficultés du marché du travail et continuer à constituer une main-d’œuvre durable, compétente et résiliente pour les années à venir.
Ce blogue a été créé sur la base de la table ronde intitulée Overcoming labour market challenges in the industry : Current and future opportunities (Relever les défis du marché du travail dans l’industrie : Opportunités actuelles et futures), qui s’est tenue lors du Congrès national 2024 de l’AIA Canada, le 24 avril 2024.